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Qui aime bien, châtie bien … ou pas

Il y a quelque temps, je suis tombée sur un article de blog qui parlait des frappes. La mère s’y dédouanait plus ou moins de donner des tapes de temps à autres à son fils désobéissant et qui la regardait avec défi de surcroit. Dans les commentaires, plusieurs parents abondaient dans son sens en précisant qu’ils avaient reçu quelques claques, dans leur enfance et que ça ne les avait pas tués. Au contraire, certains y voyaient un véritable moyen d’éduquer, de montrer les limites infranchissables, d’échelonner les interdits en somme. Une frappe c’est quand on a atteint le summum du danger, de l’insolence … etc.

Je me souviens que cette lecture m’avait beaucoup remuée.

Dans Elever son enfant … autrement, Catherine Dumonteil-Kremer évoque ce sujet et laisse la place une fois de plus à quelqu’un d’autre pour en parler. Olivier Maurel, auteur de plusieurs livres sur l’éducation sans violence, notamment La fessée, 100 questions-réponses sur les châtiments corporels, écrit :  » Il ne devrait plus être possible, aujourd’hui, de parler de « bonne fessée ». Un grand nombre d’études ont montré que les effets de la fessée et de la violence éducative en général sont multiples, graves, et commencent dès le plus faible niveau des coups donnés. Ces effets consistent en maux que subit l’enfant ou qu’il fait subir à d’autres. »

Il mentionne notamment le manque de confiance en soi, la tendance à la dépression, aux conduites autodestructrices, mais aussi la tendance à régler les conflits par la violence, à frapper les autres à son tour (logique en même temps …)

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A ceux qui comme dans les commentaires du blog que j’avais lu, précisent qu’ils n’ont pas été eux-même traumatisés par les frappes, Olivier Maurel répond qu’heureusement, tous les enfants ayant été frappés par leurs parents n’en subissent pas les séquelles. Notamment s’ils ont rencontré une personne leur témoignant compréhension et compassion. Mais il souligne à quel point il est paradoxal de juger normal de frapper un enfant alors que ce comportement violent est bien souvent condamné dans notre société. Concernant les frappes dites éducatives, on accepte l’inacceptable alors même qu’il s’agit des êtres que l’on doit le plus protéger. Là est le paradoxe, et ceci s’expliquerait notamment par la transmission familiale. Si on a été frappé, qu’on n’a pas été traumatisé alors on reproduira probablement le schéma en banalisant totalement cette violence. Or, même en mettant de côté l’aspect paradoxal, il ne faut pas oublier que chaque enfant a sa personnalité et sa sensibilité, les effets ne seront pas les mêmes pour tous. Or ils peuvent être très néfastes dans la construction personnelle d’un futur adulte.

Olivier Maurel écrit ceci :  » Pour le comprendre, il faut penser que l’enfant est un petit primate doté de comportements innés, comme par exemple les comportements d’attachement, d’imitation, de soumission et de sauvegarde. Aucun de ces comportements pré-programmés ne prépare l’enfant à recevoir des coups des personnes qui consituent sa base de sécurité. Son comportement d’attachement, parce qu’il aime ses parents, risque de lui faire lier définitivement l’amour à la violence. »

Je sais qu’un des arguments avancé par les personnes qui donnent des tapes à leurs enfants est qu’ils n’obéissent pas et qu’il n’y a donc pas d’autres façons de faire. Justement, je suis totalement convaincue qu’il y a d’autres manières d’agir et que la violence n’est en réalité qu’un profond aveu de faiblesse de la part des parents.

Je connais très bien ce sentiment qui monte en soi, de colère et d’impuissance qui pousse à donner une claque à un enfant. Je l’ai déjà ressenti quand j’étais plus jeune, depuis j’ai appris à le contrôler (je rappelle que je suis enseignante, et je n’ai donc de toute façon pas le droit d’utiliser ce moyen « éducatif » avec mes élèves, sous peine de sanctions juridiques … donc oui ça me paraît faisable de gérer des enfants sans les frapper !). En effet, si ce sujet me touche c’est parce que j’ai reçu un grand nombre de claques dans mon enfance et au début de mon adolescence. Je fais partie de ceux que ça n’a franchement pas aidé dans la vie. Je n’irais pas jusqu’à dire que cela m’a traumatisée, mais très honnêtement beaucoup de choses auraient été différentes si on m’avait élevée différement (de ce point de vue là, j’entends, d’autres choses étaient très bien). Ce que j’en ai retenu, c’est que j’ai toujours reçu ces gifles quand l’adulte en face de moi était totalement démuni devant mon comportement. Je me souviens parfaitement que j’en avais instinctivement conscience (les enfants comprennent tout !) et que ça a énormément changé l’image que je pouvais avoir de cette personne. J’ai perdu confiance en elle, puis en moi. Et pour quel résultat ? Aucun, puisque ça ne conférait nullement de l’autorité, croyez-moi !

Aujourd’hui, je sais que ne pas frapper mes enfants fait partie de mes priorités non négociables en matière d’éducation. J’ai conscience qu’il s’agit d’un combat contre des habitudes ancrées en soi depuis l’enfance. Mais je sais que ce combat en vaut largement la chandelle, pour moi, pour ma fille, pour l’avenir. Oui, trouver d’autres solutions que taper c’est dur, mais nos enfants valent bien la peine qu’on se creuse les méninges !

Ceci était ma contribution au blog collectif des vendredis intellos !

Bébé lit final

 

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17 réponses »

  1. Je suis totalement d’accord avec toi. Pour moi la fessée, la claque ou n’importe quoi d’autres c’est juste bon pour soulager la colère du parent ou de l’adulte qui la donne. Mais en aucun cas le fond du conflit ne sera réglé, et je trouve que l’humiliation subit quand on se fait frappé par un adulte est t-elle que ça n’aidera absolument pas l’adulte en devenir à avoir une image positive et une confiance en soi !

  2. J’ai oublié d’ajouter que je trouve ça quand même fort en café que la violence physique entre adulte est réprimée par la loi (celle envers un enfant aussi) et que ça ne nous viendrait pas à l’idée de coller une baffe à un adulte parce qu’il refuse catégoriquement de nous accompagner faire les course (par exemple) tout ça pour dire que j’ai du mal avec les personnes qui trouvent ça normal d’élever un enfant avec quelques baffe de temps en temps !

  3. Ton texte me touche beaucoup. Tu as su, mieux que moi, mettre des mots sur ma pensée concernant la violence.
    J’ai moi aussi subi des violences quand j’étais enfant, puis adolescente. Je fais aussi partie de ceux qui ne s’en sont pas sortis indemnes, même si, aujourd’hui, cela va beaucoup mieux.
    Merci de ce bel article !
    Si ça t’intéresse, je t’invite à lire le mien de cette semaine, car je parle aussi, un peu, de ça à travers la notion de résilience. 🙂

  4. je suis d’accord avec toi, je ne vois aucun intêret à frapper, en fait, finalement, si on frappe c’est pour nous défouler, et non pas pour corriger l’enfant…
    combien de fois avons nous tapé dans un mur ou un coussin par colère pour nous défouler ?
    un enfant, par contre, ce n’est ni un mur, ni un coussin… et on n’a pas le droit.

  5. La fessée, la claque (pire, le coup de pied aux fesses) soulagent le parent sur le moment. Mais ça ne règle rien. L’enfant est calmé sur le coup, mais encore plus énervé après, et moi, petite, je ruminais ma colère (c’était le compagnon de ma mère qui me donnait des coups de pieds aux fesses), de là est née une certaine violence. Je n’ai pas d’enfant. Mais avec mes élèves, j’ai parfois envie de les frapper quand ils me poussent à bout. Je les sors de la classe, on se calme chacun de son côté et ensuite je parle, j’explique, je punis.
    Ton article est très intéressant.

  6. Tu ne seras pas surprise de lire que je suis en complet accord avec ce que tu écris là. Nous avons choisi le même auteur pour ce vendredi, comme tu le soulignes dans ton comm chez moi, et c’est un hasard mais un heureux hasard. Ses livres devraient être lus par de nombreux parents !
    Je crois que je n’ai rien à ajouter, du coup. Mais je suis tellement d’accord qu’il fallait que je le dise 😉

  7. Moi aussi, entièrement d’accord, j’ai écrit à ce sujet aussi. Chez nous, pas de fessées, de tapes, ni de punitions et de récompenses. On essaie toujours de trouver une alternative, de parler, d’écouter, de « réparer » la « bêtise »… Merci Filliozat, Faber et Mazlish, vous me savez la vie 😉

  8. Comme tu l’as si bien dit, ce n’est pas toujours évident de refouler ces comportements ancrés en nous en raison de notre propre expérience, heureusement que nous avons aujourd’hui accès à divers supports (internet, livres…) qui nous permettent de trouver des alternatives à nos actes. Merci pour partager ces lectures!

  9. Ton article est très interessant!
    Je suis tout à fait d’accord avec toi, ça va de soi.
    Mais je pense souvent à ces enfants qui n’ont pas des parents qui réflechissent à leurs actes…
    Je n’ai jamais été frappée, j’en ai parlé aussi dans le billet de Cécilie : j’ai reçu une fois une fessée qui m’a humiliée au plus haut point, et je suis heureuse de ne pas l’avoir vécu une seconde fois.
    Et oui, les fessées, les tapes ne sont pas du tout une méthode éducative, ce n’est qu’un moyen pour l’adulte de se liberer de ses tensions et de masquer ses propres failles.
    Mon mari et moi même ne levons pas la main sur nos enfants. Mais l’autre jour, ma fille ainée de 11 ans était insupportable, elle faisait sa petite crise dans le couloir chez mes beaux parents, mon mari y est parti en disant qu’elle allait voir ce qu’elle allait voir. Ma BM a crié de ne pas la frapper, ça nous a tellement surpris et étonnés, sachant qu’on ne fait jamais ça, que nous avons tous les trois éclaté de rire, y compris ma fille!

  10. Je me souviens qu’enfant, j’avais beaucoup de peine pour mes camarades qui avait peur de ramener un mauvais bulletin et de recevoir des coups de martinet…
    Pour plaisanter, mon père disait parfois qu’il allait acheter un martinet, mais quand il disait ça, je pensais à mes amis qui en avaient réellement un chez eux :-S

  11. Ton article est comme toujours très bien écrit, je suis complètement d’accord avec toi..
    Il y a quelques décennies les punitions et autres chatiments corporel étaient la norme, heureusement on a su réfléchir et se rendre compte qu’une alternative était possible.
    Ayant reçu une éducation très rigide et sévère je suis en complet désaccord avec les parents qui osent lever la main sur leur enfant.
    Je note tes lectures sur ma fameuse liste to read..
    Bonne journée

  12. Merci beaucoup de ta contribution!!!! Je viens de lire vos commentaires… je sens que je ne vais rien avoir à ajouter!!!! Vous avez fait les liens avec les autres contributions (et elles sont nombreuses aujourd’hui sur la questions de violences éducatives autant que sur la questions des « limites »!!!)
    Merci de nous avoir fait partager vos réflexions!
    Bon week end à vous toutes et à lundi pour le débrief!!!

  13. Une belle contribution, très bien écrite. Et que je trouve incroyablement convaincante, si on ne l’était pas déjà.
    Merci, tu renforces ma conviction.

  14. Bonjour, je lis ton billet, et étrangement ca me fait penser à celui que j’ai ecrit sur « la féssée…ou pas! ».lien http://www.lesaventuresdemamandoudou.com/article-la-fessee-ou-pas-82534409.html
    Je suis tout à fait d’accord avec ce que tu écris. Malgre tout, et malgre le fait que je suis d’accord, il m’arrive parfois de mettre une tape sur les fesses… et jamais par plaisir, mais parce que je craque… Quand rien en marche, ni discussion, ni punition, ni echange mais que mon enfant hurle à devenir rouge, à s’etouffer et toussé en quinte, ben je le dis, je craque. C’est pas du tout une excuse, je le concois à 100%, oui, je suis d’accord c’est une faiblesse. Oui en effet, il existe pleins d’alternatives, et oui je le sais que ce n’est pas une solution comme je le dis dans mon billet. C’est justement ca etre mere apprendre de ses erreurs, apprendre à evoluer. Pour preuve et je suis fière de le dire, la 1ere fois que je lui ai mis une fessée c’etait en octobre 2010, on est en aout,et ca n’arrive plus, meme une punition (assis sur une chaise) est quasi inexistante… c’est que j’ai appris à devenir mère et posée, et mon fils a appris à gérer lui aussi ses emotions, et à m’écouter. Etre mère, ce n’est pas être parfaite, être mère c’est reconnaitre ses faiblesses. Quant au livre, en effet il peut donner de bons conseils, mais je pense que chaque cas est unique, et que chaque maman grandit avec le temps… alors evoluons, ne pensons pas qu’il n’y a qu’une bonne facon de faire… et apprenons des autres. a bientot.
    Linda maman doudou

  15. Bonjour Maman Doudou. Je viens de lire ton article que je découvre. En le lisant, j’ai l’impression, corrige moi si je me trompe, que tu ne cautionnes pas les fessées mais que tu ne les diabolises pas non plus.
    Mon article est volontairement écrit comme un parti pris. Mon but était de convaincre et de permettre des prises de conscience. Dans ce cas, on écrit forcément de manière un peu radicale.
    J’ai parfaitement conscience, même si j’en parle peu dans l’article, que dans les faits il est très tentant de donner une claque et que surtout ça peut arriver sans que l’on soit pour autant le pire des parents. Evidemment ! Par ailleurs, il m’est assez facile de dire tout cela alors que ma fille n’a que 8 mois … on en reparlera dans un an !
    Malgré tout, je reste convaincue que les violences physiques (et je n’en parle pas mais je pense même au fait de tirer le bras ou le tee-shirt … des gestes que pour le coup je trouve beaucoup plus dur à contrôler !!!) n’ont aucun fondement éducatif, même si cela peut fonctionner à court terme. Je parle là en prenant du recul sur le geste et quand on intellectualise l’acte. Et sans intellectualiser, du point de vue du ressenti comme je l’ai mal vécu étant enfant, je n’ai pas envie de reproduire le schéma.
    Mais cela reste un idéal, un objectif à atteindre, je refuse d’en démordre. Je sais qu’un jour peut-être, je donnerai un claque. Comme tu le décris si bien dans ton article. J’en parlais aussi dans un commentaire chez une autre blogueuse : la fatigue et le stress peuvent nous éloigner de nos objectifs. Mais si ça devait m’arriver, dans mon esprit ça resterait un échec, une erreur à ne pas réitérer.
    Mais bien sur, nous ne sommes pas parfaits, comme tu le dis. Le tout est surtout d’en parler et de ne pas en faire une habitude !!!

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