Quand Minicap est née, notre relation s’est tout naturellement faite fusionnelle. Avec le temps, cela a évolué mais finalement peut-être pas autant que dans nombre de familles. Elle est longtemps restée mon grand bébé. Un peu de mon fait, un peu du sien aussi. On a eu du mal à couper le cordon toutes les deux et au final nous sommes restées bien accrochées l’une à l’autre.
Il faut dire aussi que les conditions de séparation n’ont jamais été idéales pour moi. Soit le mode de garde ne me convenait pas (et à elle non plus d’ailleurs), soit il était compliqué. Cela n’a pas aidé, les nombreux problèmes rencontrés par Barbe de 4 jours et moi durant les premières années de Minicap non plus. Puis, je le pense véritablement, la personnalité de la belle était ainsi. Elle a toujours été, même tout bébé d’une sensibilité solaire, un tempérament de feu qui expose et explose ses émotions à la vue des proches avec ce que cela peut engendrer de fort et parfois de fatigant dans le même temps. Et moi, sa maman, je me suis engouffrée dans toute cette sensibilité exprimée, avec tout ce que la mienne portait à son tour.
Puis, Minicap a du faire face à la grossesse et à l’arrivée de sa sœur. Beaucoup de choses difficiles à encaisser pour une petite encore si avide de tendresse, de cocon familial et d’attention.Quand Petite R est arrivée, j’ai eu peur. Les relations entre Minicap et moi sont devenues ombrageuses. Derrière chaque échange, un reproche à demi avoué, comme un contrat déchiré. Déjà pendant cette seconde grossesse, je ne me sentais plus en totale fusion avec Minicap. Je ne l’oubliais pas pour autant, je l’aimais toujours aussi fort, j’étais toujours cette maman folle de sa petite. Mais j’avais une autre responsabilité aussi forte, un amour aussi prenant qui grandissait dans mon ventre et qui en arrivant m’a obligé à changer mes façons de faire, mes attentes et mes priorités. A l’arrivée de Petite R, je n’ai plus pu laisser place à la fusion entre Minicap et moi. Il a fallu jongler entre les moments de tendresse, entre les moments de soin et d’attention à prodiguer à chacune. De façon assez inégale, étant donné l’âge de Petite R. Et j’ai du faire avec la fatigue. Barbe de 4 jours a du s’occuper de Petite R mais surtout de Minicap.
J’ai bien essayé de montrer à Minicap que je l’aimais toujours autant, que j’avais moins de temps pour elle mais que cela changerait bientôt. Mais il faut dire que mes mots face aux faits ont eu bien peu de poids. Petite R me prenait beaucoup de temps, je lui donnais beaucoup de mon amour et ça Minicap a eu du mal à l’accepter. Elle l’a montré de bien des façons difficiles à encaisser pour des parents fatigués. Je lui en ai voulu aussi, de façon totalement irrationnelle. Je lui en ai voulu de me rendre la tâche encore plus difficile, de créer parfois de la confusion dans mon esprit de maman, de m’obliger parfois à délaisser un bébé encore si petit. Je m’en suis voulue, j’ai eu le cœur déchiré. Puis finalement, avec le temps, petit à petit les choses se sont apaisées. Notamment, grâce à nos premières sorties à nouveau, à deux. Des sorties de grandes que sa sœur ne peut pas faire : un cinéma, un restaurant, des plaisirs retrouvés en toute complicité. Des instants de grâce qui nous ramène 18 mois en arrière, et cela nous fait du bien à toutes les 2, à chaque fois.
Parfois, l’amertume reprend le dessus. J’ai éprouvé une certaine ambivalence des sentiments ce jour où Petite R a hurlé de douleur, le bras marqué par la morsure de sa sœur de 3 ans et demi son aînée. Mais aujourd’hui, bien plus qu’à nos débuts, j’arrive à me montrer rationnelle, à me rappeler que Minicap est la grande sœur mais reste petite et surtout j’essaye de faire avec sa personnalité à elle. Oui, à 4 ans, cette petite fille qui n’a jamais mordu personne, a mordu sa petite sœur. Elle ne l’a plus jamais fait depuis mais cela montre à quel point dans la relation qui s’instaure entre ces deux petites, la sensibilité de l’aînée prend parfois le dessus. C’est ainsi et je dois faire avec.
Et surtout depuis ces moments houleux, Minicap a grandi, grandi ! Car au delà de toutes ces difficultés, une fois cette épreuve passée, Minicap a su en retirer tout le bénéfice possible. Elle a pris de l’assurance, a grandi, pris son envol. A l’école, elle a énormément progressé dans ses apprentissages, rattrapant de façon fulgurante un retard qui s’était installé, elle se fait des amis, est heureuse de venir chaque matin. Elle suit ses cours d’anglais avec bonheur et quand je lui dis de ne pas avoir peur du centre de loisirs, elle me répond tout simplement « mais je n’ai pas peur maman ! »
Et avec toute cette assurance est venue une toute nouvelle relation entre nous. Minicap continue de me demander beaucoup d’attention, elle cherche mon approbation, me demande des explications pour tout, insiste pour que je lui lise l’histoire du soir et refuse de dormir avant mon retour les (rares) soirs où je sors. Mais d’un autre côté, elle sait laisser sa place à sa sœur et cela passe forcément par des moments où elle s’efface, où elle va jouer de son côté, donner la main à quelqu’un d’autre ou s’ouvrir aux autres. Finalement, par la force des choses, elle a bien du apprendre à se détacher, pour son plus grand bien.
Néanmoins, nos relations sont plus houleuses qu’avant, c’est certain. Il arrive que le ton monte entre nous, ce qui n’arrivait jamais auparavant. Mais cela vient aussi du fait que Minicap grandit, sa personnalité avec et l’opposition entre elle et nous ses parents évolue également. Parfois, je m’énerve trop vite, je perds patience. Souvent je regrette mais il m’arrive aussi de me dire que cela l’aide à s’affirmer et à se détacher. De plus, bien vite, je reprends le temps de lui expliquer et de lui porter de l’attention car tout cela : nos liens qui se tissent et cette relation qui se construit au fil du temps doivent reposer sur un équilibre en constante remise en cause. Telle une funambule, je marche et m’aventure sur la corde de notre histoire. Je tente et m’avance sans trop savoir de quoi demain sera fait, avec la seule certitude de ma volonté de bien faire, toujours. Avec mes travers, les siens, notre histoire et avec la force aussi du temps qui passe et enseigne. Aujourd’hui, je pense que nous touchons du doigt une certaine forme d’équilibre, nous y sommes presque !